Premières lignes #361

Bien le bonjour, cher·es lecturovores !
Récemment, j’ai rejoint un club de lecture IRL qui vient de se créer par chez moi. L’idée pour la prochaine rencontre étant de lire l’un des livres présentés le premier soir, je me suis tournée vers la nouvelle Récitatif de Toni Morrison. De cette écrivaine, Beloved ne m’avait pas autant emballée que ce à quoi je m’attendais ; L’œil le plus bleu était terrible mais je l’ai adoré. Quant à Récitatif, je vous en reparle bientôt sur le blog mais je peux d’ores et déjà vous dire que j’ai beaucoup apprécié. C’est pour cette raison que je partage avec vous les premières lignes de cette nouvelle – la seule écrite par Morrison.
Bon dimanche à vous.

Le principe : chaque semaine, je prends un livre et je vous en cite les premières lignes du récit. Pensez à mettre le lien de votre RDV en commentaire de l’article ou, si vous avez une page ou une catégorie dédiée, n’hésitez pas à me le faire savoir ; cela facilitera l’actualisation.
N’oubliez pas de me citer, ça fait toujours plaisir ♡

 

Ma mère dansait toute la nuit et celle de Roberta était malade. Voilà pourquoi on nous à emmenées à St-Bonny. Les gens veulent vous prendre dans leurs bras quand vous leur dites que vous avez été dans un foyer, mais franchement, celui-ci n’était pas si mal. Pas une immense salle en longueur avec cent lits comme à Bellevue. Quatre par chambre, et quand on est arrivées, Roberta et moi, il y avait une pénurie de gosses à prendre en charge, donc on était les seuls affectées de la 406 et on pouvait aller d’un lit à l’autre, si on voulait. Et on voulait, en plus. On changeait de lit tous les soirs, et pendant les quatre mois entiers où on a été là-bas, on n’en a jamais choisi un seul pour être notre lit permanent.
Ça n’avait pas débuté comme ça. À la minute où je suis entrée et où Bozo le Clown nous a présentées, j’ai eu la nausée. Être tirée du lit tôt le matin, c’était une chose, mais être coincée dans un lieu inconnu avec une fille d’une race tout à fait différente, c’en était une autre. Et Mary, à savoir ma mère, elle avait raison. De temps à autre, elle s’arrêtait de danser assez longtemps pour me dire quelque chose d’important, et une des choses qu’elle a dites, c’était qu’ils ne se lavaient jamais les cheveux qu’ils sentaient bizarres. Roberta, c’est sûr. Qu’elle sentait bizarre, je veux dire. Donc quand Bozo le Clown (que personne n’appelait jamais Mme Itkin, de même que personne ne disait jamais St-Bonaventure) a dit : « Twyla, voici Roberta. Roberta, voici Twyla. Faites-vous bon accueil », j’ai répondu : « Ma mère, ça va pas lui plaire que vous me mettiez ici.
— Bien, a dit Bozo. Alors peut-être qu’elle va venir te chercher pour te ramener à la maison. »
C’est pas de la méchanceté, ça ? Si Roberta avait ri, je l’aurais tuée, mais elle n’a pas ri.

Récitatif, Toni Morrison, 1983.

Récitatif

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