Premières lignes #367

Il y a de ces romans qui intriguent et c’est le cas avec le premier roman du « projet secret » de Brandon Sanderson, Tress de la mer Émeraude. Il semble que ce soit un récit de pirate et de fantasy et c’est clairement ce qui m’a attirée mais, quand on ouvre le livre et qu’on lit les premières lignes du texte, on nous parle thé et cheveux. Pour sûr, l’auteur sait nous surprendre et, en ce qui me concerne, il sait comment me donner envie !
Bon dimanche à vous 🫖

Le principe : chaque semaine, je prends un livre et je vous en cite les premières lignes du récit. Pensez à mettre le lien de votre RDV en commentaire de l’article ou, si vous avez une page ou une catégorie dédiée, n’hésitez pas à me le faire savoir ; cela facilitera l’actualisation.
N’oubliez pas de me citer, ça fait toujours plaisir ♡

LA FILLE

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Une fille vivait au beau milieu de l’océan, sur un rocher.
Ledit océan n’avait pas grand chose à voir avec celui que vous imaginez.
Le rocher non plus ne ressemblait pas à ce que vous avez sans doute en tête.
La fille, en revanche, était peut-être telle que vous l’imaginez – à supposer que vous l’imaginiez réfléchie, à la voix douce, et aimant un peu trop collectionner les tasses.
Les hommes la décrivaient souvent comme ayant des cheveux de la couleur des blés. D’autres évoquaient plutôt le caramel, ou occasionnellement le miel. Elle se demandait pourquoi ils utilisaient si souvent des termes liés à la nourriture pour parler des attributs féminins. Il y avait une faim, chez ces hommes, qu’il lui semblait préférable d’éviter.
À titre personnel, elle trouvait « châtain » suffisamment descriptif – même si la teinte de ses cheveux n’était pas leur caractéristique la plus intéressante. Elle-même aurait plutôt mis l’accent sur leur indiscipline. Chaque matin, elle les domptait héroïquement avec une brosse et un peigne, puis les muselait au moyen d’un ruban et d’une tresse bien serrée. Certaines mèches trouvaient pourtant toujours un moyen de s’échapper – pour s’agiter librement dans le vent, et saluer jovialement tous ceux que la jeune femme croisait.
Elle avait reçu à la naissance le patronyme malencontreux de Glorf (pas de jugement : c’était un nom de famille), mais ses cheveux indisciplinés lui valaient l’appellation que tout le monde lui connaissait : Tress. Ce surnom était, à ses yeux, l’élément le plus intéressant de sa modeste personne.

Tress de la mer Émeraude, Brandon Sanderson, 2023.

Tress de la mer Émeraude

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Paola

Paola

Quatrième de couverture :

Les délices de Tokyo

Les Délices de Tokyo

Quatrième de couverture :

Premières lignes #354

Salutations !
Aujourd’hui, je vous partage les premières lignes d’une lecture qui m’a émue la semaine passée : Les délices de Tokyo.
Bon dimanche à vous 🥞

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Doraharu, marchant de dorayaki.
Sentarô passait ses journées debout derrière la plaque chauffante.
Sa boutique était située en retrait de la route longeant la voie ferrée, dans la rue commerçante baptisée Sakuradôri, « rue des Cerisiers ». La rue se distinguait pourtant plus par le nombre de commerces fermés que par ses cerisiers plantés çà et là. Malgré tout, en cette saison, il semblait y avoir un peu plus de passants que d’habitude, peut-être attirés par les fleurs.
Sentarô remarqua une vieille femme immobile au bord du trottoir sans y attacher d’importance. Il se concentra sur le saladier dans lequel il mélangeait la pâte. Devant la boutique se dressait un cerisier en pleine floraison, pareil à une masse bouillonnante de petits nuages. Sentarô était persuadé que c’était ce qu’elle contemplait.
Néanmoins lorsqu’il releva la tête un peu plus tard, la dame au chapeau blanc n’avait pas bougé. Et ce n’était pas le cerisier qu’elle regardait, mais lui. Il la salua machinalement. Alors, un sourire légèrement emprunté aux lèvres, elle s’approcha à petits pas.

Les délices de Tokyo, Durian Sukegawa, 2013.

Les Délices de Tokyo

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Premières lignes #353

Bonne année à toutes et à tous ! Que 2023 vous apporte de la joie, de belles découvertes et de superbes rencontres 🎉
Pour ce 1er janvier, j’ai opté pour les premières lignes d’un roman que je vais lire sans tarder : Paola de Vita Sackville-West. Toutefois, je viens de me réveiller et je ne suis pas encore certaine qu’il s’agira là de ma première lecture de l’année. Et vous, par laquelle allez-vous commencer ?

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Lundi

C’est un lundi soir à sept heures que mes avocats me téléphonèrent pour m’apprendre la mort de mon oncle Noble Godavary. Désolés de m’appeler si tard, ils se permettaient de me suggérer de profiter du train de nuit pour être sur place dans le Nord dès le lendemain matin.
En les écoutant me prescrire ce programme, je réalisai à quel point le ressentiment que l’on éprouve envers les liens familiaux est au moins aussi fort que ce qui les a construits. Néanmoins, cette nouvelle tombait bien. Cela faisait quelque temps que j’avais une vague envie de quitter Londres mais je n’arrivais même pas à formuler une demande de congé. Au bureau, j’étais souvent à deux doigts de lancer : « Au fait, je prendrais bien quelques jours… », puis bizarrement rien ne sortait et je retournais à mes rêveries sans suite de bord de mer et de champs de bruyère. Et voilà qu’après cette période de flottement, une voix invisible m’amenait à prendre enfin une décision et je me retrouvais en train de noter des horaires dictés oar cet inconnu de chez Bradshaw.

Paola, Vita Sackville-West, 1932.

Paola

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Rebecca

Rebecca

Résumé de l’éditeur :

Christine

Christine

Quatrième de couverture :

Libertyville (Pennsylvanie), un patelin tranquille qui cesse de l’être – tranquille…
… le jour où Arnie, lycéen dans le bel âge ingrat, tombe amoureux de Christine. Pas une jolie brune, pas une rousse fatale, non : une vieille Plymouth Fury 58 qui n’est plus qu’une ruine rouillée à mort.
Grâce à Arnie – bricoleur-né –, elle reprend vie et bientôt elle roule ! Mais à sa guise : elle cale sans motif puis bondit comme un fauve, tout ça avec des grincements qui ressemblent à des cris. Bref, à part son conducteur, personne ne se sent bien dans cette méchante bagnole. Et surtout pas Leigh, la douce petite amie d’Arnie.
Arnie d’ailleurs n’est plus le même. Il y a du drame dans l’air, pire que du drame… Que s’est-il donc passé sur la chaîne de Detroit où est née Christine ?

Anno Dracula

Anno Dracula, tome 1

Quatrième de couverture :

Londres, 1888. Depuis que Dracula a épousé la reine Victoria, la terreur règne sur la capitale. Sous l’influence du sulfureux comte, les citoyens sont de plus en plus nombreux à rejoindre les rangs des vampires, toujours plus puissants, et il ne fait pas bon être simple mortel. Mais la riposte ne se fait pas attendre. Dans les sinistres ruelles de Whitechapel, des prostituées vampires sont assassinées par un mystérieux inconnu aux scalpels d’argent. Lancés dans la traque du tueur, Geneviève Dieudonné, une vampire à la jeunesse éternelle, et Charles Beauregard, espion au service du Diogene’s Club, vont devoir gravir les échelons du pouvoir. Et s’approcher dangereusement du souverain le plus sanguinaire qu’a jamais connu le royaume…

Premières lignes #335

Bien le bonjour, les aficionados de la lecture !
C’est dimanche, c’est Premières lignes. On arrive à la fin des vacances estivales et donc, d’ici une vingtaine de jours, arrivera l’automne. Pour ma part, rien de mieux que des bouquins horrifiques, des romans gothiques et autres histoires avec des créatures fantastiques pour me plonger dans l’ambiance. Au programme aujourd’hui, Anno Dracula 🧛‍♂️

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« Nous, les Szekeley, avons toutes les raisons d’être fiers, car dans nos veines coule le sang de maintes tribus qui bataillèrent avec un courage de lion pour affirmer leur suprématie. Ici, dans le tourbillon des races européennes, surgit le clan des Ugriques, descendu d’Islande et possédé par l’amour du combat que leur avaient légué Thor et Odin. Leurs Berserkers montrèrent une telle férocité sur toutes les rives de l’Europe, d’Afrique et d’Asie, que les populations terrifiées crurent que c’étaient des loups-garous. Et c’est ici aussi qu’ils s’opposèrent aux Huns dont la furie guerrière avait submergé les terres tel un incendie meurtrier, jusqu’à ce que les mortels portent dans leur sang celui de ces vieilles sorcières qui, chassées de Scythie, s’étaient accouplées avec les démons du désert. Fous d’humains ! Quel guerrier fut plus redoutable qu’Attila dont le sang court dans ces veines ? Comment s’étonner que nous ayons été une race conquérante et que nous ayons refoulé les Magyars, les Lombards, les Avars, les Bulgares ou les Turcs quand leurs hordes déferlèrent sur nos frontières ? Quoi de surprenant à ce qu’Arpád et ses légions nous aient trouvé sur sa route ? Et quand le flot hongrois se déversa à l’est, les Szekeley furent déclarés cousins par les Magyars victorieux, et des siècles durant nous eûmes la garde de la frontière turque ; et sans cesse nous la surveillâmes, car comme le disent les Turcs, “l’eau dort parfois, l’ennemi jamais”. Qui, parmi les Quatre Nations qui reçurent “l’Épée Sanglante”, en fut plus fier que nous ? Et quand fut rachetée la honte de Cassova, où les étendards des Valaques et des Magyars touchèrent le sol devant ceux frappés du Croissant, qui, sinon l’un de nous, alors voïvodes, traversa le Danube pour aller humilier les Turcomans sur leurs propres terres ? Oui, ce fut un Dracula ! Et quel malheur que son traître de frère ait vendu son peuple à l’ennemi et l’ait ainsi livré à la honte de l’esclavage… Mais une fois encore, après la bataille de Mohács, nous brisâmes le joug hongrois, et à la tête de la révolte allaient les Dracula, car nous n’acceptons pas d’être privés de liberté. Ah, jeune homme, les Szekeley – et les Dracula qui sont leur sang, leur esprit et leur épée – ont la capacité d’établir une dynastie bien plus grande que celle des Habsbourg ou des Romanov. L’époque des guerres appartient au passé. Le sang est chose trop précieuse en ces temps de paix déshonorante et la gloire des grandes races n’est plus qu’une histoire racontée au coin des feux. »

Comte DRACULA

Anno Dracula, Kim Newman, 1992.

Anno Dracula, tome 1

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Premières lignes #326

En 2018, je vous partageais l’incipit de Vingt-quatre heures de la vie d’une femme de Stefan Zweig. Alors que je vais enfin me lancer dans ce texte d’ici peu, je me rends compte que ce n’est pas tant l’introduction qui m’intéresse – elle est intéressante, mais elle parle de l’écrivain or, je ne vais pas vous mentir, quand je veux lire un bouquin, c’est l’histoire qui m’attire avant tout. Alors, aujourd’hui, je vous partage les premières lignes du récit ; il prend place avant la Première Guerre mondiale.
Bon dimanche à vous.

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Dans la petite pension de la Riviera où je me trouvais alors (dix ans avant la guerre) avait éclaté à notre table une violente discussion qui brusquement menaça de tourner en altercation furieuse et fut même accompagnée de paroles haines et injurieuses. La plupart des gens n’ont qu’une imagination émoussée. Ce qui ne les touche pas directement, en leur enfonçant comme un coin aigu en plein cerveau, n’arrive guère à le sémouvoir ; mais si devant leurs yeux, à portée immédiate de leur sensibilité, se produit quelque chose, même de peu d’importance, aussitôt bouillonne en eux une passion démesurée. Alors ils compensent, dans une certaine mesure, leur indifférence coutumière par une véhémence déplacée et exagérée.
Ainsi en fut-il cette fois-là dans notre société de commensaux tout à fait bourgeois, qui d’habitude se livraient paisiblement à de small talks et à de petites plaisanteries sans profondeur, et qui le plus souvent, aussitôt après le repas, se dispersaient : le couple conjugal des Allemands pour excursionner et faire de la photo, le Danois rondelet pour pratiquer l’art monotone de la pêche, la dame anglaise distinguée pour retourner à ses livres, les époux italiens pour faire des escapades à Monte-Carlo, et moi pour paresser sur une chaise du jardin ou pour travailler. Mais cette fois-ci, nous restâmes tous accrochés les uns aux autres dans cette discussion acharnée ; et si l’un de nous se levait brusquement, ce n’était pas comme d’habitude pour prendre poliment congé, mais dans un accès de brûlante irritation qui, comme je l’ai déjà indiqué, revêtait des formes presque furieuses.
Il est vrai que l’événement qui avait excité à tel point notre petite société était assez singulier.

Vingt-quatre heures de la vie d’une femme, Stefan Zweig, 1927.

Vingt-quatre heures de la vie d’une femme

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