Bien le bonjour, bien le bonsoir !
Pour les premières lignes de ce dimanche, j’ai choisi le début de la préface de Titiou Lecoq (dont j’apprécie grandement le travail) du livre Autrices : Ces grandes effacées qui ont fait la littérature. C’est pertinent et ça permet d’entrevoir ce que nous allons retrouver par la suite dans l’ouvrage, dont les textes sont choisis et présentés par Daphné Ticrizenis.
Bonne lecture à vous.
Le principe : chaque semaine, je prends un livre et je vous en cite les premières lignes du récit. Pensez à mettre le lien de votre RDV en commentaire de l’article ou, si vous avez une page ou une catégorie dédiée, n’hésitez pas à me le faire savoir ; cela facilitera l’actualisation.
N’oubliez pas de me citer, ça fait toujours plaisir ♡
PRÉFACE DE TITIOU LECOQ
À l’école, comme je l’ai déjà raconté, les femmes étaient à peu près totalement absentes de mes cours d’histoire, depuis le CP jusqu’à la terminale. En français, ce n’était pas tellement mieux. Si je cherche dans ma mémoire les auteurs que j’ai étudiés me viennent : La Fontaine, Pagnol, Molière, Boris Vian, Corneille, Rabelais, Hugo, Zola, Rousseau, Voltaire.
Le constat était claire : la littérature était une affaire d’hommes. Selon mes professeurs, cette surreprésentation s’expliquait simplement. Les hommes avaient davantage écrit, alors que les femmes avaient été empêchées par les circonstances. Elles avaient été assignées au foyer et n’avaient pas pu consacrer leur vie à créer une œuvre. Il ne fallait donc pas voir dans les anthologies littéraires une quelconque marque de sexisme, mais simplement le reflet d’une réalité historique. Ainsi, la prestigieuse collection de la Pléiade expliquait en 2014 : « Nous sommes loin de la partié, il est vrai ; mais force est de constater que l’histoire littéraire elle-même s’écrit au masculin jusqu’au milieu du XXe siècle ; et il n’est pas à la portée de la collection, si bienveillante soit-elle, de la corriger. »
D’ailleurs, preuve supplémentaire de cette absence de sexisme, quand certaines écrivaines avaient réussi à échapper à cet esclavage, on ne manquait pas de leur faire de la place, ainsi Marie-Madeline de Lafayette, Germaine de Staël ou George Sand.
Cette idée de la femme empêchée, on la retrouve dans une livre important, Une chambre à soi de Virginia Woolf. L’autrice se demande quel aurait été le destin de la sœur de Shakespeare. S’il avait eu une sœur aussi douée que lui et désireuse d’écrire, aurait-elle pu réussir ? Woolf conclut que non, que cette femme, Judith, aurait fini pauvre et désespérée à cause d’une société qui lui aurait interdit de concrétiser ses ambitions artistiques. Ce que Woolf ne pouvait pas savoir en 1929, c’est que Shakespeare a eu des sœurs.
Un paquet.
Des femmes qui ont écrit, il y en a toujours eu, malgré ce que croit la Pléiade. Parce que l’on imagine que la condition des femmes va forcément d’un état d’asservissement total vers la libération, on pense que les femmes du passé étaient enfermées dans leurs maisons. C’est faux. Comme vous allez le découvrir avec ce livre, les femmes, dès le Moyen Âge, écrivaient. Des poèmes, des pièces, des mémoires. Elles parlaient d’histoire, de politique, de pouvoir. Elles défendaient leurs idées, elles prenaient position dans les débats de leur temps. Elles s’appelaient Azalaïs de Porcairagues, Na Castelosa, Anne de France, Marguerite de Navarre, Catherine de Parthenay.
Mais il y a encore plus étonnant. Non seulement les femmes artistes existaient, mais en plus, certaines d’entre elles rencontraient le succès. Elles étaient publiées, elles étaient lues, elles existaient dans la vie artistique et intellectuelle de leur époque.
Autrices : ces grandes effacées qui ont fait la littérature, tome 1 : du Moyen Âge au XVIIe siècle, textes choisis et présentés par Daphné Ticrizenis, 2022.

Autrices : ces grandes effacées qui ont fait la littérature, tome 1 : du Moyen Âge au XVIIe siècle
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